Par un décret n° 2011-2065 du 30 décembre 2011 relatif aux règles de passation des baux emphytéotiques administratifs le pouvoir réglementaire vient enfin de mettre fin à 24 ans de règne du plus illégitime des contrats administratifs : le bail emphytéotique administratif.

Très mal né, le BEA créé (l’on se demande pourquoi) sur le modèle du bail emhytéotique du droit rural était destiné à sécuriser l’investissement du secteur privé. Il permettait, rappelons-le, de conférer des droits réels sur les contructions édifiées sur le domaine public.

A partir de cet innocent objectif, le BEA a fait son 2 décembre : prévu pour n’être qu’une forme particulière d’occupation du domaine public, il est devenu un véritable contrat de la commande publique.

Sur le fondement de l’article L. 1311-2 du code général des collectivités territoriales [ref] Article issu de l’article 13 de la loi n° 88-13 du 5 janvier 1988, codifié au code des communes puis à l’article L. 1311-2 CGCT par la loi n° 96-142 du 21 février 1996[/ref] les collectivités territoriales ont fait réaliser des ouvrages tels que des stations d’épura
tion des eaux usées, des usines de production et de traitement de l’eau potable, des piscines, etc. Les conventions d’exploitation “non détachables” confiaient, comme l’imposent les dispositions du code, des missions d’intérêt général ou de service public (la différence étant, dans la plupart des cas, impossible à faire) consistant en l’exploitation de ces ouvrages.

Quelle différence existait-il dès lors entre ces BEA et des délégations de service public ou des marchés publics ? La plupart du temps : aucune. A part ceci : le délégataire ou l’attributaire du marché disposait de droits réels sur le domaine public, en vertu de son BEA.

Quelles procédures de publicité et de mise en concurrence s’imposaient à l’adinistration contractante : aucune.

Il était cependant très vite apparu que ces conventions, qui étaient traitées “en tant que telles” n’étaient que des paravents derrière lesquels se cachaient les véritables contrats. Mais aucune disposition d’aucune loi ne le disait expressément. Une commande publique “de l’ombre” s’est développée, durant les années 1990. Mais la ficelle devenait de plus en plus grosse.

Ce n’est pas l’objet de ce bulletin d’information rapide que de présenter toutes les implications de cette réforme bienvenue.

 

Notons simplement qu’il existe désormais deux types de BEA (en dehors des BEA particuliers tels que les BEH dans le domaine hospitalier) :

– les BEA qui ne sont que le support de droit réels conférés au cocontractant. Ces BEA n’existent plus en tant que tels au regard des règles de publicité et de mise en concurrence. Ce seront les plus nombreux.

– les BEA qui servent à la réalisation d’un projet d’intérêt général, notamment dans le domaine cultuel, et qui ne correspondent donc pas à une “commande publique”. Ces BEA ne répondent pas aux besoins de la collectivité. Il n’existe pas a priori de raison pour que ces BEA hors commande publique soient soumis à des règles de publicité et de mise en concurrence. Il faudra cependant se méfier, car l’on connait le caractère très attractif de la notion de marché de travaux en droit communautaire et, partant, de celle de concession de travaux (v. par exemple  CJCE, 12 juillet 2001, Ordine degli Architetti delle Province di Milano, aff. C-399/98, p. I-5409, concl. Ph. Léger).